La pétition

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DÉCLARATION DES DROITS DU FLEUVE LA TET
TET VIVA

CONTEXTE GÉNÉRAL

  • RECONNAISSANT que les fleuves et les rivières sont essentiels à toute vie en soutenant une merveilleuse diversité des espèces et des écosystèmes, en alimentant ou drainant les aquifères, les zones humides et autres habitats aquatiques, en fournissant des nutriments vitaux aux estuaires côtiers et aux océans, en transportant les sédiments vers les rivières et deltas, et en remplissant d’autres fonctions écologiques essentielles;
  • CONSCIENTS que les cours d’eau jouent ainsi un rôle essentiel dans le fonctionnement du cycle hydrologique de la Terre, et que la viabilité des fleuves et des rivières à jouer ce rôle dépend de nombreux facteurs, dont le maintien des bassins hydrographiques, des plaines d’inondation et des zones humides environnantes;
  • RECONNAISSANT la dépendance absolue des êtres humains à l’égard des fleuves et des systèmes aquatiques qui permettent la vie humaine en fournissant de l’eau propre et abondante pour boire et pour l’assainissement, en fertilisant les sols des plaines alluviales, en procurant des sources alimentaires pour des milliards de personnes, des loisirs et des usages culturels, comme ils l’ont fait depuis le début de la civilisation humaine, résultant en une interdépendance précieuse entre les humains et les autres formes de vie;
  • ALARMÉS par le fait que les sociétés humaines ont causé une pollution importante des rivières et des fleuves dans le monde entier, notamment des matières organiques provenant des eaux usées et des égouts, des déchets plastiques, des agents pathogènes et des nutriments provenant de l’agriculture, et les contaminants de l’industrie, en plus de nombreuses autres formes et sources de pollution et d’une dégradation de la continuité écologique et du transport des sédiments avec les barrages, avec pour conséquence un déclin de la santé et de la biodiversité aquatiques, ainsi que d’importants effets négatifs sur la santé humaine;
  • CONSCIENTS que la dégradation et l’exploitation des cours d’eau ne sont pas seulement des problèmes environnementaux mais aussi une question de droits pour les communautés locales, puisque la destruction des cours d’eau menace l’existence même et le mode de vie de ceux qui en dépendent pour leur bien-être;
  • INQUIETS de la contradiction croissante entre le respect du fonctionnement naturel des écosystèmes aquatiques et le développement des activités humaines qui nécessitent d’importants prélèvements des ressources en eau ne faisant qu’augmenter en raison du changement climatique;
  • GUIDÉS par la reconnaissance croissante à travers le monde de droits inhérents aux fleuves et aux rivières, notamment en Équateur par la voie constitutionnelle pour la Nature dans son ensemble, en Nouvelle-Zélande par la voie législative pour le fleuve Whanganui, aux États-Unis par la voie d’ordonnances municipales prises dans une dizaine d’Etats pour des écosystèmes aquatiques, au Canada par l’adoption de deux résolutions municipales concernant la rivière Magpie, en Inde, au Brésil et en Colombie par la voie jurisprudentielle et en Corse par la déclaration des des droits du fleuve Tavignanu en juillet 2021;
  • CONSTATANT qu’un nouveau paradigme est en train d’opérer dans le monde afin de reconnaître la Nature comme un bien commun et sujet de droit qui doit être respecté et préservé pour sa valeur intrinsèque, mais aussi pour les générations présentes et futures ainsi que les autres espèces, repensant ainsi les rapports entre humains et non-humains;

CONCERNANT LE FLEUVE LA TET

  • ATTENDU QUE la Tet est le premier fleuve de Catalogne Nord, prenant sa source au pied du pic Carlit, à 2 405 m d’altitude, traversant d’Ouest en Est le département des Pyrénées-Orientales sur 114,8km, d’abord le Conflent, puis le Roussillon, jusqu’à son embouchure dans la mer Méditerranée, à Canet-en-Roussillon, après avoir traversé la ville historique de Perpignan;
  • ATTENDU QUE la Tet traverse les cinq communautés de communes (i) des Pyrénées Cerdagne, (ii) des Pyrénées Catalanes, (iii) du Conflent Canigò, (iv) de Roussillon Conflent et (v) de Perpignan Méditerranée Métropole dans la basse vallée jusqu’à son embouchure;
  • ATTENDU QUE la Tet constitue un ensemble indivisible avec sa ripisylve, ses nappes souterraines d’accompagnement et ses écosystèmes, ses zones humides, ses 43 affluents et ses lacs et étangs qui se situent tout le long de son cours, de sa source jusqu’à proximité de son embouchure;
  • ATTENDU QUE la Tet constitue l’une des principales ressource en eau des Pyrénées-Orientales et permet d’approvisionner en eau potable près de 50 % de la population du département, soit une cinquantaine de communes regroupant près de 300 000 habitants, garantissant ainsi le droit d’accès à l’eau des populations locales;
  • ATTENDU QUE la vallée de la Tet et son bassin versant comportent 18 sites naturels qui font partie du réseau européen Natura 2000 avec des milieux allant des espaces lagunaires à la haute montagne. Le bassin compte également 81 ZNIEFF (zone naturelle d’intérêt floristique et faunistique), 5 ZICO (zone importante pour la conservation des oiseaux), 7 réserves naturelles et un PNR (Parc Naturel Régional des Pyrénées Catalanes);
  • ATTENDU QUE la vallée de la Tet abrite ainsi une biodiversité remarquable en termes d’habitats naturels, de faune et de flore avec des plantes rares et des espèces animales protégées et menacées telles que le desman des Pyrénées, la loutre d’Europe, l’Euprocte des Pyrénées, la musaraigne de Miller, le Grand tétras ou encore le Gypaète barbu, l’Emyde lépreuse, l’agrion de Mercure, les souches méditerranéennes de truite fario et de truite arc-en-ciel, l’anguille, le barbeau méridional, regroupant ainsi de nombreuses espèces patrimoniales qui présentent un intérêt scientifique et écologique et une valeur intrinsèque;
  • ATTENDU QUE la Tet joue un rôle essentiel pour les activités agricoles, la sylviculture et la pêche, l’agriculture existant dans cette région depuis l’Antiquité et participant à faire du pays Catalan un jardin fertile et productif, car le bassin versant de La Tet concentre les 2/3 des superficies irriguées du département ce qui représente environ 10 000 hectares, dont 80% de vergers avec pour production dominante la pêche. Le bassin comporte en effet un réseau important de plus de cent  canaux, édifiés pour certains dès le Moyen Âge voire dès l’époque des Templiers (XIIIème siècle) pour alimenter forges et moulins;
  • ATTENDU QUE la vallée de la Tet joue un rôle essentiel pour la pratique d’autres activités économiques et énergétiques avec la présence d’un réseau de centrales hydroélectriques servant notamment à faire fonctionner le train jaune, mais aussi des activités humaines de loisir, telles que la pêche, le ski, le thermalisme, le kayak, la baignade et la randonnée, qui favorisent l’écotourisme, et qu’elle participe comme un véritable pilier de la vie culturelle de la région;
  • ATTENDU QUE hormis certaines zones protégées, la Tet ne dispose actuellement d’aucun statut particulier de protection pour elle-même et dans son intégralité comme élément naturel structurant de  l’écosystème;
  • ATTENDU QUE la Tet ne bénéficie actuellement que d’un simple contrat de rivière, non contraignant juridiquement, et qu’un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) qui pourrait être opposable aux personnes publiques et privées tarde à se mettre en place, alors que des travaux d’envergure nécessitant des investissement financiers importants doivent être mis en oeuvre rapidement pour préserver le fleuve et prévenir toute atteinte à son encontre;
  • ATTENDU QUE la bonne santé et la préservation de la Tet sont indispensables pour les droits des générations présentes et futures à un environnement sain et à l’eau ;
  • ATTENDU QUE l’érosion du lit de la Tet s’aggrave d’année en année et que la surface supérieure du réservoir de la nappe aquifère du Pliocène, nappe non-renouvelable à l’échelle d’une vie humaine, affleure en plusieurs endroits, le risque est grand de vidanger la nappe captive qui commence déjà à s’écouler dans le lit de la Têt par endroits;
  • ATTENDU QUE la rupture du toit des nappes superficielles a pour conséquence que des éléments polluants les contaminent et risquent de rendre l’eau impropre à sa consommation d’ici quelques années;
  • ATTENDU QUE la baisse du niveau de la nappe du pliocène entraîne une pénétration d’eau salée irréversible dans les zones littorales rendant l’eau impropre à la consommation dans ces zones très habitées;
  • ATTENDU QUE le droit fondamental d’accès à l’eau potable des habitants de la vallée de la Tet et de la plaine du Roussillon, soit près de 300 000 habitants, se trouve ainsi menacé et que, sans la mise en place de règles de gestion strictes,  il ne sera plus possible de puiser l’eau dans le fleuve et ses nappes d’accompagnement d’ici une dizaine d’années;
  • ATTENDU QUE le fleuve Tet se trouve en outre menacé, notamment sur sa partie aval, par des politiques d’aménagement et de gestion, notamment avec la RN116 et l’endiguement excessif des berges, qui mettent en danger l’ensemble de son fonctionnement biologique et naturel, par une absence de génie écologique et de soutien des populations locales, mettant en danger la préservation de la ressource et les écosystèmes naturels qui s’y rattachent;
  • ATTENDU QUE la Tet voit son cours barré, dans sa partie amont, aux Bouillouses et à Vinça par un barrage réservoir et écrêteur de crues qui modifie son écoulement et le transport des alluvions solides;
  • ATTENDU QUE que la partie arborée de la ripisylve n’est pas entretenue par une gestion forestière adéquate qui permette de respecter les arbres et arbustes et de lutter ainsi avec des solutions naturelles contre les menaces de crues, ce qui ne permet plus le rôle de coupe feux de cette barrière naturelle comme en témoigne l’incendie récent de Néfiach d’août 2021;
  • ATTENDU QUE les associations En Commun 66 et Notre Affaire à Tous, à l’origine de la présente déclaration, ainsi que de nombreux élus, citoyens et autre associations, sont préoccupés par les menaces qui pèsent sur la Tet;

Pour ces raisons Nous, En Commun 66 et Notre Affaire à Tous

DÉCLARONS CE QUI SUIT:

  1. Le fleuve la Tet est une entité vivante et indivisible de sa source jusqu’à son embouchure, délimitée par son bassin versant, et dispose de la personnalité juridique.
  1. En tant que personne juridique, la Tet possède les droits fondamentaux suivants :
    • – le droit d’exister, de vivre et de s’écouler ;
    • – le droit au respect de ses cycles naturels ;
    • – le droit de remplir ses fonctions écologiques essentielles ;
    • – le droit de ne pas être polluée ;
    • – le droit d’alimenter et d’être alimentée par des aquifères de manière durable ;
    • – le droit au maintien de sa biodiversité ;
    • – le droit à la régénération et à la restauration naturelles ;
    • – le droit d’ester en justice.
  1. Les droits de la Tet pourront être défendus en justice par l’intermédiaire de ses gardiens, agissant comme représentants légaux en son nom.
  1. Les gardiens seront nommés ultérieurement. Ils incluront des représentants des signataires de la présente déclaration, ainsi que de toute collectivité ayant vocation à s’y associer pour défendre les intérêts du fleuve.
  1. Les gardiens pourront réclamer réparation du préjudice subi par la Tet et recevoir une compensation qui sera utilisée pour le propre bénéfice du fleuve.
  1. Les intérêts de la Tet devront être évalués et pris en compte par les entités publiques et privées pour chaque action ou décision concernant le fleuve.
  1. La mise en œuvre de cette déclaration respectera les activités humaines existantes, pourvu qu’elles ne portent pas atteinte aux droits du fleuve la Tet, ainsi que le droit de propriété des riverains.
  1. Les pouvoirs publics devront assurer une évaluation régulière de la santé de la Tet en collaboration avec tous les acteurs concernés, en particulier ses gardiens.
  1. Les pouvoirs publics devront déployer des moyens financiers suffisants pour permettre le respect des droits fondamentaux de la Tet, en particulier le droit à la restauration naturelle.
  1. Les pouvoirs publics devront veiller à préserver l’intérêt social et écologique le long de la Tet, et toute nouvelle construction, tous nouveaux travaux ou toute nouvelle activité qui seront envisagés devront se faire en consultant préalablement les gardiens désignés de la Tet et en tenant compte de l’avis qu’ils auront émis.
  1. Les décisions prises par les pouvoirs publics concernant la Tet devront être guidées par les principes de précaution et de solidarité écologique.
  1. Les élus locaux et les instances délibérantes sont invités à soutenir et à adopter la présente déclaration en séance et à assurer son effectivité.

SIGNATURES

En Commun 66

 Philippe Assens 

Notre Affaire à Tous 

Marine Yzquierdo

Avec les premiers soutiens de :

Alternatiba 66

ANV COP21

Association Als Horts

Collectif Alternatives aux pesticides 66

Collectif Codal’Terre

FRÊNE 66

Jeunes pour le Climat 66

Les Amis de la Terre 66

Néfiach Environnement

SETA

Tavignanu Vivu (Corse)

Terre de Liens Corsica

UMANI (Corse)

Camille de Toledo, écrivain et juriste

Eric Mahieux, maire de Baillestavy

Marie Toussaint, eurodéputée

Nicolas Berjoan, conseiller municipal à Prades

Valérie Cabanes, juriste internationaliste

La Tet

La Tet (Têt en français) est un fleuve côtier catalan des Pyrénées-Orientales de 114,8 km de long. La vallée de la Tet est classée pays d’art et d’histoire.

Les Travaux

Le fleuve Tet fait l’objet d’aménagements lourds et récurrents qui mettent à mal l’intégrité écologique du fleuve, de la ripisylve et de l’ensemble du système hydrique qui l’accompagne.
Phillipe Assens
Président de En Commun 66